COMMENT LES SITES TOURISTIQUES S'ARMENT CONTRE LE TOURISME DE MASSE

Certaines destinations européennes explorent de nouvelles pistes pour lutter contre l’afflux de visiteurs.

Peu avant le début de la saison estivale, des milliers d'habitants et d’habitantes des îles Canaries protestent contre le tourisme de masse. Concrètement, ils demandent de limiter le nombre de touristes et d'arrêter la construction de nouveaux hôtels.

Les protestataires brandissent des pancartes sur lesquelles on peut notamment lire: «Les îles ne sont pas à vendre», «Stop Hôtel» ou encore «Nous ne voulons pas voir notre île mourir».

Les locaux rendent le surtourisme responsable de la hausse des loyers, de la pénurie d'eau et des problèmes de gestion des déchets. Les îles Canaries comptent 2,2 millions d'habitants et d’habitantes. Or l'année dernière, près de 14 millions personnes venues d’ailleurs ont passé leurs vacances dans l'archipel espagnol.

Des destinations populaires comme Barcelone et Amsterdam ont d’ores et déjà commencé à lutter contre le tourisme de masse. La métropole espagnole a fermé son port aux bateaux de croisière à proximité de ses zones résidentielles. La capitale néerlandaise, elle, a augmenté la taxe de séjour de 7% à 12,5% cette année.

Il existe cependant des lieux touristiques qui s'engagent dans de nouvelles voies. C'est ce que montrent les exemples suivants:

Mont-Saint-Michel, France

L'attraction touristique avec son île rocheuse et son abbaye poursuit une stratégie connue sous le nom de «démarketing». Concrètement, la commune veut dissuader les visiteurs et visiteuses de venir au Mont-Saint-Michel en publiant sur les réseaux sociaux des images montrant… le surtourisme.

Lors du week-end prolongé de l'Ascension, en mai dernier, l’Office du tourisme avait ainsi publié sur X (anciennement Twitter) des photos montrant de longues files d'attente sur le chemin de l'abbaye et demandant aux touristes de reporter leur visite. Ce type de communication est censée avoir un effet dissuasif et permettre de mieux canaliser les flux de visiteurs.

Plus de 3 millions de touristes visitent le site chaque année, dont environ 1 million pendant la saison estivale. La commune elle-même comptait seulement 25 habitants et habitantes aux dernières nouvelles.

Florence et Lucerne

Florence, située en Toscane, mise sur la technologie pour gérer le surtourisme en temps réel. Elle a lancé l'application Feel Florence. Il s'agit d'un service qui propose aux visiteurs et visiteuses des itinéraires et des expériences sur la base de la demande touristique actuelle.

Grâce à des capteurs répartis dans toute la ville, l'application informe la clientèle des attractions qui sont bondées. L'application suggère par ailleurs aux utilisateurs et utilisatrices des attractions alternatives.

Aux dernières nouvelles, Florence accueillait jusqu'à 11 millions de touristes par an. La ville compte 366’000 habitants et habitantes.

L'année dernière, Lucerne a mené un projet pilote sur un principe similaire. De mars à décembre 2023, la ville a compté sur cinq sites le nombre d'appareils tels que smartphones, tablettes ou smartwatches qui se connectaient à des points d'accès avec internet sans fil. De cette manière, le flux de personnes a pu être enregistré.

Les données ainsi obtenues seront mises à la disposition du public et serviront de base aux futures étapes visant à mieux gérer l'afflux de cars de tourisme et à orienter plus habilement les flux de visiteurs à travers la ville.

L'année dernière, les touristes ont généré 1,3 million de nuitées à Lucerne. La ville vient de franchir le cap des 85'000 habitants et habitantes.

Barcelone, Espagne

Les habitants et habitantes du quartier de La Salut sont les premiers surpris que leur métropole ait réussi à faire passer cette proposition: le gouvernement de la ville a demandé aux groupes technologiques américains Google et Apple de retirer la ligne de bus 116 de leurs services de cartographie en ligne.

La ligne en question s'arrête au Parc Güell, considéré comme le deuxième site touristique le plus populaire après la basilique de la Sagrada Família. Ce sont surtout les personnes âgées qui se sont plaintes des bus bondés, car les applications proposaient la ligne de bus pour planifier le voyage des touristes.

Entre-temps, la ligne a bel et bien disparu des applications. Et cela semble avoir l’effet escompté: «Au début, nous avons ri de l'idée», a déclaré le militant local César Sánchez au journal britannique «The Guardian». «Mais nous sommes surpris que la mesure ait été aussi efficace.»

L'année dernière, 4,4 millions de touristes ont payé une entrée dans le parc. Barcelone compte environ 1,6 million d'habitants et habitantes. La région métropolitaine, elle, compte plus de 5 millions de personnes.

Fujikawaguchiko, Japon

La ville japonaise située au pied du légendaire volcan Fuji aura recours à une solution plutôt pragmatique qui a déjà fait la une des journaux du monde entier. Elle bloquera tout bonnement la vue sur la plus haute montagne du pays, comme le rapporte le journal anglophone «Japan Times». Elle prévoit d'ériger un filet à mailles sombres de 20 mètres de long et de 2,5 mètres de haut sur un site très prisé pour les photos.

«Il est regrettable que nous devions faire cela parce que certains touristes ne parviennent pas à respecter les règles», a déclaré un porte-parole de la ville, cité par le journal. Les visiteurs laisseraient des déchets derrière eux et ne respecteraient pas le Code de la route, a ajouté l'officiel.

Depuis la fin des règles strictes contre le coronavirus, le Japon connaît un boom du tourisme par les visiteurs étrangers. En mars, pour la première fois, plus de 3 millions de voyageurs et voyageuses sont venus d'outre-mer. Cela représente un nouveau record en termes de nombre de visiteurs mensuels.

Venise, Italie

La ville teste dès à présent un nouveau type de taxe de séjour. Normalement, les régions touristiques ne prélèvent cette taxe que lorsque les touristes passent la nuit dans la station. Or Venise expérimente désormais une «taxe d'accès» pour les touristes qui ne passent pas la nuit dans la ville.

Concrètement, chaque visiteur et visiteuse paie, et ce depuis le 25 avril, 5 euros par jour, de 8 h 30 à 16 h. Venise va tester cette taxe obligatoire pendant 20 jours au cours des trois prochains mois. Sur la base des résultats, la ville envisage d'introduire définitivement cette «taxe d'accès» dès l'année prochaine.

Venise accueille jusqu'à 30 millions de touristes par an. La plupart d'entre eux font une excursion d'une journée. Environ 50’000 autochtones vivent dans le centre historique de la ville.

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